Dans les pays du Bassin du Congo des communautés vivant en zone forestière sont souvent en mal avec l’invasion des pachydermes qui dévastent des plantations, causent des accidents avec les humains. Pour tenter de mettre fin aux désastres causés par des éléphants, certaines pratiques innovantes sont mises en place par des ONG afin de préserver la biodiversité et garantir la survie des communautés locales et populations autochtones. Au Congo dans la localité de Bomassa à plus de 900km de Brazzaville, les communautés expérimentent la barrière électrique protégeant leurs champs grâce à l’appui de l’ONG américaine Wildlife conservation society (WCS).
« Avant, on souffrait pour nos plantations qui étaient souvent dévastées par les éléphants. Avec l’arrivé du projet Elanga, aujourd’hui dans le village Bomassa nous avons en permanence le manioc, les arachides, la banane et bien d’autre arbres fruitiers… », lâche tout joyeuse Louise Ngouengué, la soixantaine accomplie, mère de famille.
Louise Ngouengué fait partie des 59 familles qui expérimentent la barrière électrique protégeant leurs plantations des inclusions des pachydermes et d’autres espèces animales mis en place par l’ONG américaine Wildlife conservation society (WCS) dans le cadre du projet “Elanga (plantation en langue lingala)”.
Dans la localité de Bomassa et bien d’autres départements forestiers des pays du Bassin du Congo, les communautés locales et populations autochtones (CLPA) sont confrontées aux dévastations des plantations par des éléphants, un conflit aujourd’hui qui met en mal la coexistence homme-faune dans ces départements causant ainsi la raréfaction de certains produits agricoles. « Avant qu’on expérimente la barrière électrique, nos plantations étaient dans la forêt et constamment dévastées par les éléphants, depuis la mise en place de la barrière électrique tout autour de nos plantations ils (éléphants) ne s’approchent plus et nos produits champêtres sécurisés », se réjouit Jean Pierre Mbingo, autochtone et l’un des agriculteurs à « Elanga ».
Une parade impeccable
Avant de mettre en place cette barrière électrique, une quinzaine d’expériences étaient développées à Bomassa, Bon-coin, Kabo pour tenter d’apporter de solutions dans le cadre du conflit homme-éléphant, mais malheureusement toutes ses expériences ont donné des résultats moins satisfaisants et ce n’est qu’en 2019 que WCS a expérimenté ce système de protection électrique dénommé projet « Elanga ». En lui-même, ce système est constitué d’un petit panneau solaire, de deux batteries de 100 ampères chacune et d’un appareil qui envoie la tension au niveau des câbles électriques.
A ce jour, cette barrière sécurise 4 hectares soit 4000m2 où sont installées 59 familles qui pratiquent l’agriculture depuis juillet 2019 en toute sécurité et quiétude.
« Pour évaluer l’activité animal et la performance de la barrière, nous avons installé une quinzaine de cameras autour du champ et nous avons fait le suivi durant 24 mois et enregistré durant ce suivi 130 visites d’éléphants avec 90 tentatives de destruction et aucune tentative n’a réussi, aucun éléphant n’a pu traverser la barrière, c’est à partir de ce suivi que nous avons effectivement conclu l’efficacité du système de protection électrique », explique Cisquet Kiebou Opepa, chargé au développement communautaire et responsable du volet coexistence homme-faune à WCS.
L’érection réussie de cette barrière vient consolider la coexistence paisible entre la population locale et les éléphants afin de promouvoir la préservation de la biodiversité et la sécurité alimentaire de la communauté.
Une expérience à exporter dans la sous-région
Aujourd’hui, le succès que connait le champ électrique de Bomassa a permis non seulement de le divulguer mais aussi constitue l’objet d’étude de cas un peu partout. Ce projet s’exporte déjà à Kabo, un village un peu proche de Bomassa avec l’installation dans les jours à venir de 18 hectares. De l’autre côté du parc National Odzala Kokoua et le parc national de Ntokou- Pikounda, l’équipe de WCS a mis en place une plateforme pour s’échanger, partager des expériences et des informations sur les questions liées à la multiplication de conflit entre l’homme et la faune sauvage.
Au niveau de la sous-région de l’Afrique centrale, lors de la réunion des trois aires protégées de Lobeké au Cameroun, Dzanga-Sangha en Centrafrique et Nouabale Ndoki au Congo, tenue du 7 au 11 juin 2022 à Bayanga (RCA), il a été recommandé que l’expérience de Bomassa devrait être documenter et ensuite partager aux autres aires protégées afin qu’eux-aussi de leur côté voir comment elles pouvaient, selon leur contexte l’appliquer. Déjà au niveau du TRI-National la Sangha (TNS) le processus est en cours. « Nous recevons toujours des appels et mails des amis de Djanga-Sangha avec lesquels on partage les informations sur le modèle de Bomassa, sur le design que nous développons ici. Nous recevons beaucoup des appels et des messages », explique Cisquet.
Selon le chargé au développement communautaire et responsable du volet coexistence homme-faune de WCS, leur « plateforme a pour objectif d’échanger mais aussi de faire des plaidoyers au niveau institutionnel pour que le Congo adopte la barrière électrique comme moyen légal de lutte contre les attaques des cultures par les éléphants », fait-il savoir, avant de suggérer si « l’état pouvait adopter ce système comme moyen légal de lutte contre les dévastations des cultures par les éléphants, comme au Gabon où un décret présidentiel a été pris à propos».